I hate you, I love you ∆ Riley

Avez-vous déjà aimé quelqu'un que vous n'aurez jamais dû aimer ? Vous êtes-vous déjà retrouvé dans l'incapacité d'aimer ceux qui sont de votre sang ? Vous êtes-vous déjà retrouvé plus bas que terre ?

Je ne suis pas trop du genre à parler de moi, encore moins à me confier. Pourtant, je vais le faire, ici, maintenant, pour que pussiez me comprendre, me cerner un peu mieux. Commençons par le commencement. Du plus loin que je me souvienne, j'étais Faith Marks, un enfant pétillante mais néanmoins mordante. J'aimais profiter de la vie, profiter de mes proches. Ma mère ? Je l'adorais, tout simplement, je l'ai toujours trouvé tellement gentille et compréhensive, jamais elle ne disait non, ou presque (bah oui parce que c'était une mère quand même). J'ai vécu une enfance tranquille et joyeuse, j'allais en cours, même si je n'aimais pas trop ça, c'était l'occasion de voir mes amis. Justement en parlant d'amis, je les voyais souvent, on sortait, on s'amusait. Le reste du temps, je le passais à la maison, avec ma mère, on avait pleins de points de communs, pleins de loisirs identiques. Du coup, on faisait pas mal de trucs ensemble, c'était sympa. Vous voyez que, pour le moment, ça n'a pas grand intérêt. J'étais une fille normale avec une vie normale. Je ne vais pas plus m'étendre sur le sujet car je risque de vous endormir.

Parlons plutôt du soir où tout a basculé. J'étais allée à une fête chez ma meilleure amie, enfin une fête qu'organisait son grand frère (son canon de grand-frère). Vous avez compris mes motivations. La soirée s'est bien passé, on a fait un tas de jeux, on a dansé, on a rit. Rien de plus normal. Seulement j'ai voulu rentrer tôt chez moi, alors, à cinq heures du matin, j'ai pris la voiture. Bien que j'avais eu largement le temps de dessouler, on n'aurait pas pu me qualifier de sobre, la preuve je suis rentré dans un poteau. Rien de très grave, c'était en plein quartier résidentiel, je roulais à trente à l'heure tout au plus. Pourtant, la police a été alerté. Je me suis retrouvé au commissariat de police après qu'on est testé mon alcoolémie et qu'il soit ressortie à 0,5g/L de sang. De là, j'ai eu le droit à tout un speech de l'officier de police, on m'a expliqué qu'il allait prendre mes empreintes et que cet accident figurerait dans mon casier jusqu'à mes dix-huit, sous réserve que je ne fasse plus de connerie. Je ne vais vous mentir, je ne faisais vraiment pas la fière. J'avais surtout peur de la réaction de ma mère. Ainsi, on m'a mise en cellule jusqu'à ce qu'elle vienne me chercher. Pourtant, elle n'est jamais venue. Au lieu de ça, un policier a pris place près de moi pour me parler. Il m'a expliqué que, ma mère n'était pas ma mère, enfin il a surtout essayé car je n'ai rien compris. Comment aurais-je pu, ma mère est ma mère, point barre. J'ai toujours été avec elle, toutes mes photos, tout mes souvenirs sont à ses côtés. Mais non, tout était faux, on l'a traité de kidnappeuse, de criminelle, de folle dangereuse. Ce n'était pas le cas, ça ne pouvait pas l'être. Je connaissais ma mère, il n'y avait pas plus gentille qu'elle. Elle était la meilleure. Seulement, pour les policiers, il n'y avait pas de doute, le résultat du fichier d'empreinte était formel, j'avais bien été enlevé à mes un an.

De là, ma "vraie" famille est venue me chercher. C'était épique comme rencontre, on m'a serré dans les bras, on m'a dit qu'on m'aimait, qu'on était heureux de me retrouver. Mais, moi, je n'étais pas heureuse. Je voulais ma mère, ma vraie mère, celle que j'ai toujours connue. Non pas une véritable inconnue sortie de nulle part. J'ai pourtant du m'y faire, j'ai quitté mes amis, j'ai quitté ma maison... Tout ça pour partir vivre à Akaora, avec les Davis. Parce que oui, tout le monde m'appelait Tonya Davis. Je n'arrivais pas à réagir à ce prénom, je m'appelais Faith, je m'étais toujours appelé Faith. Ma famille, les Davis, était plutôt riche, il me faisait faire tout un tas de truc. M'acheter je ne sais combien de fringues, de maquillage, de fournitures. C'était sympa, je ne nie pas mais, je ne me suis jamais vraiment sentie à l'aise. Je n'en ai pas eu le temps.

Un peu près six mois après que j'ai emménagé chez les Davis, j'ai vécu une nouvelle nuit d'horreur. Près de moi, dans mon lit, j'entendais quelqu'un chanter. J'étais encore à moitié endormie, pourtant, j'arrivais très bien à me souvenir de cette chanson, c'était celle que ma mère, ma fausse mère, me chantait le soir quand je n'arrivais pas à m'endormir. Réveillée en sursaut, je me suis rendue compte qu'elle était bien là, en face de moi. J'ai voulu crier mais elle m'a fait taire, elle m'a dit qu'elle allait me ramener à la maison. Ça peut paraître horrible mais, une partie le voulait. C'est ce pourquoi j'ai obtempéré, ça et parce qu'elle ne me lassait pas vraiment le choix. Je ne soupçonnais pas une seule seconde qu'elle puisse être en possession d'une arme. Les Davis, mes parents, alternés par les bruits, sont bien vite venus à notre rencontre. Il y a lutte et les coups de feux sont parties. Je me suis jeté sur mon père, blessé en premier, j'essayais d'arrêter l'hémorragie, je pleurais. Je hurlais contre celle qui avait été ma mère. J'ai vu mon père pousser son dernier souffle... Plus hystérique que jamais, ma "mère" essaya de m'empoigner pour que je la suive mais la police est arrivée à temps. Couverte de sang, assise par terre, pleurant à chaud de larme, j'essayais de répondre aux questions de la police. C'était trop dur... Je venais de passer de trois parents à zéro.

Les familles d'accueil ont été nombreuses, aucunes n'étaient à la hauteur. Il y avait toujours une mère qui buvait, un père violent, un frère un peu trop affectif. J'ai fait de nombreuses conneries durant cette période, j'ai beaucoup bu, j'ai beaucoup fumé aussi. Je sortais tard le soir, que dis-je, la nuit, parce que je ne rentrais même pas. J'ai commencé à sortir avec un type louche, plus âgé. Je passais sa drogue pour lui. Je faisais n'importe quoi, j'avais même du mal à me rappeler ce que j'avais fait la veille. Enfin, j'étais en bordel en somme. Ça allait très mal, vraiment. Seulement un jour, par hasard, j'ai croisé le frère canon de mon ancienne meilleure amie, vous vous souvenez ? Lui, il se souvenait de moi en tout cas. Je peux même vous dire qu'il a été choqué de voir dans l'état dans lequel j'étais. Personne de ceux qui m'ont connu en tant que Faith Marks ne savaient ce qui s'était passé par la suite. Ils croyaient tous que j'étais heureuse avec ma nouvelle famille, que je ne manquais de rien. Belle erreur et il s'en est bien vite rendu compte. Sans lui, je serais toujours dans le caniveau. Il m'a hébergé pendant un temps, il a pris soin de moi. Il m'a fait arrêté l'alcool et toutes mes conneries. Il était génial, je peux même vous dire que, passé un moment, j'avais de réel sentiment pour lui.

Un matin, en me réveillant, j'ai décidé que c'en était trop, que je ne pouvais plus vivre à moitié comme que je le faisais. Je ne faisais plus de conneries, certes, mais, je me contentais de survivre. Alors, sans un mot, je suis partie. J'ai déménagé à Wellington, j'ai toujours voulu voir la capitale. J'ai entamé des démarches pour changer de nom, je ne me suis jamais vraiment sentie comme une Tonya de toute manière. J'ai trouvé un boulot plutôt rapidement, j'ai eu de la chance. Je bosse dans une bijouterie, plutôt côté d'ailleurs. On m'a dit que ma tête convenait bien à l'image de la franchise, je n'ai pas cherché à comprendre, j'ai  pris ce qu'on m'offrait. Quoi de plus normal, j'avais besoin d'argent. Je me suis trouvé un petit studio cosy dans un immeuble assez sympathique, un peu plus tard. Une de mes voisines à même finit par devenir une très bonne amie. Elle sait tout de moi même si je n'ai pas vraiment intentionnellement révélé mon passé. Un soir, je me sentais mal, j'avais bu et j'ai sonné à sa porte, je ne sais plus trop pourquoi. Je lui ai tout déballée, je ne m'en souviens même plus mais, visiblement ça a été fait puisqu'elle m'en a parlé le lendemain matin. Depuis Norah est devenu mon amie, ma confidente. Je ne sais pas trop ce que je ferais sans elle pour être honnête car quelques fois, je pète vraiment un plomb.

Ça devait être quelques mois plus tard, j'ai trouvé un chien au bord de la route, un Husky, je l'ai ramené avec moi, bien évidemment. Je comptais le déposer à un chenil ou quelque chose du genre mais on m'a convaincu de le garder, ma psy m'a convaincu de le garder. Elle a dit que la présence d'un animal pourrait m'aider à m'ouvrir plus et à me faire baisser quelque peu ma garde. Oui, je vois une psychologue, quitte à prendre un nouveau départ, autant le faire correctement. En effet, depuis tout ça, je suis devenu un peu cynique, très méfiante et pas franchement optimiste. On essaie de travailler sur ça même si c'est difficile. Personne n'est au courant que je la vois, même pas Norah, je préfère garder ça pour moi.

Ainsi, c'était ma vie et je la vivais plutôt bien. J'y allais doucement, étape par étape. Je ne voulais pas prendre le risque de tout faire foirer en voulant aller trop vite. Je ne me liais pas trop, j'avais une amie, ça me suffisait, quelque fois même je trouvais que c'était trop pour moi. Je vous ai prévenu que j'étais en bordel... Ce que je n'avais pas prévu, au contraire, loin de là même, c'était que quelques mois plus tard, j'allais me retrouver en couple. Il avait renversé mon chien. Drôle de rencontre hein ? Au début il m'horripilait, quoi de plus normal, il avait renversé mon chien. Mais comme il a tenu à tout payer, je me suis dit que j'allais lui laisser une chance. Les choses en amenant une autre, on s'est pris à discuter, il était sympa, il n'avait pas la langue dans sa poche, bref, j'aimais bien. J'ai moins apprécié cela-dit quand il a voulu m'inviter à prendre un verre, je ne cessais de refuser. Je ne voulais pas me faire désirer non, je me sentais simplement pas prête pour ce genre de relation. Sauf qu'il s'est avéré très difficile de lui dire non. Il est tenace et surtout, soyons franc, très attirant. J'ai eu beau tenter de rester loin de lui, rien n'y faisait. Il m'attirait comme si c'était un aimant. Alors, j'ai finit par dire oui et je ne sais plus trop comment, je me suis retrouvé en couple avec lui. Vous savez qui en entraîne une autre, etc ? Ça se passe étrangement bien, il me laisse mon espace, on ne parle de notre passé, on n'a pas trop de mots, pas de dispute. Enfin techniquement, on se chamaille tout le temps, on se taquine mais, on s'est très bien que ce n'est pas sérieux. Ça me convient comme relation, vraiment. Et parfois, c'est justement ça qui me fait peur. Il a prit une place dans ma vie que je n'aurais pas imaginé et je me demande ce qui se passera quand il ne sera plus là. C'est ce qui me pousse à garder une certaine distance, à me forger une carapace. Je ne veux pas souffrir et je sais d'expérience que, quand on s'entache, on finit toujours par en pâtir. J'ai voulu mettre fin à cette relation à plusieurs reprises mais, une fois devant lui, je n'en ai jamais le courage. Il me fait perdre tout sens commun. C'est vrai qu'en soit, je n'ai aucune raison de vouloir arrêter, tout se passe bien mais, c'est moi et mes problèmes. Alors, je vois ce qui se passe au jour le jour.

J'ai une vie épanouissante maintenant, c'est vrai. J'ai des amis, un copain, un boulot, un appart'. Vraiment, j'ai tout pour être bien, pourtant, honnêtement je ne pense pas être réellement heureuse. Je fais toujours des cauchemars, des fois je me sens oppressée, incapable de respirer. Je bois pour oublier, je reste seule dans mon appartement quelques fois pendant des jours. Je ne compte pas le nombre de fois où j'ai inventé des excuses bidons pour ne pas voir mes amis ou même quelques fois Ace. Une chance pour moi, je suis une bonne menteuse alors personne ne se doute de rien. Sauf Norah qui évidemment, sait tout.