when i was your man. (othello)

Othello,
O-the-llo,
Mon amour,

C’est ce soir que j’atteindrai la lune.
Je sais que tes mains tremblent en lisant ses mots, car si tu trouves cette lettre dors et déjà couverte de larmes, les miennes, c’est que je suis bel et bien partie.
J’étais décidée à rédiger ce mot depuis bien longtemps déjà, mais ce n’est que ce matin que j’ai senti qu’il était nécéssaire de le faire. Persuadée qu’un post-it suffirait, un « je t’aime » bien placé résumerait notre histoire, j’en viens pourtant à écrire une lettre et j’ai la sensation que toutes ces lignes blanches ne suffiront pas pour écrire tout ce que j’ai à te dire.
Othello, mon tendre Othello.
Je sais que je vais mourir. Si ce n’est pas ce soir, ce sera demain. Mes mains sont trop faibles pour tracer la moindre lettre, les minutes défilent à chaque mot que je griffonne.
Toi tu dors.
Ton souffle résonne le long de la chambre. Je passe des heures à l’écouter pour effacer le bruit de l’électrocardiogramme que toi non plus tu n’as jamais pu supporter. Tu es le premier médecin qui hait tant les hôpitaux. Je sais comme tu en souffres mon chéri, que de t’y rendre chaque jour, que de m’y retrouver mal en point, sans jamais une bonne nouvelle. Je sais comme tu hais tes collègues et leur honnêteté pessimiste, les regards compatissants des infirmières, le sang sur leur blouse blanche, l’odeur de renfermé de cette chambre, la buée contre la fenêtre. Mais par dessus tout, je sais que ce que tu hais le plus, c’est ton impuissance devant le regard de Teddy, car tu sais qu’un jour, il faudra bien lui expliquer la vérité.
Ne sois pas trop dur envers toi même Othello. Ne t’en veux jamais. N’aie jamais honte de l’éducation, des maladresses, des larmes, de l’impuissance que tu lui montreras un jour. Tu as le droit de souffrir et je sais que comme moi, il le comprendra très bien. Je ne m’amuserai pas à te décrire tout ce que tu devrais lui dire de ma part. Dis lui simplement que sa maman l’aime. Le reste, il le sait déjà. Il est aussi intelligent que son père, c’est un vrai Darcy.
Mon Othello, je pars ce soir. Je cède à la douleur que nous combattons ensemble depuis six ans déjà. Ne m’en veux pas de t’abandonner, j’espère sincèrement que tu trouveras un jour la force que de me pardonner pour cela. Mais nous savions toi comme moi, que cela arriverait bien un jour.
C’est pour la vie d’amour que tu m’as offert que j’écris en regardant passer le jour. Pour ce bonheur que tu as apporté dans une vie brisée, malgré tout le mal que tu savais que je t’apporterais, malgré le lit vide que tu savais que je finirai par laisser. Tu m’as aimé même si tu savais que je partirai. Tu as fait de moi ta reine, tu m’as donné le plus beau des garçons. Ensemble, nous avons défié le sort à grand coup d’éclats de rire. Pour cela, merci. Merci mille fois.
Je pars en paix avec la sensation d’avoir vécu. C’est une chose que je ne pensais pas ressentir un jour. Je n’ai pas été une malade, j’ai été une femme avant tout.
J’aimerais ne jamais conclure ce petit mot, pouvoir l’écrire toujours pour que tu ne cesses jamais de le lire, que tu trouves toujours en lui le réconfort du renouveau. Mais je te connais trésor, je sais que tu relieras ces lignes jusqu’à en connaître la moindre virgule, à tel point que tu souffriras d’atteindre le point final. Tu trouveras que je n’en ai pas assez dit, tu chercheras de moi le moindre nouveau témoignage. Tu auras la sensation d’être perdu, comme tu l’es toujours quand je ne suis pas là. Mais Othello, sache que personne n’a aussi bien guidé ma vie que tu l’as fait. Tu sais où tu vas trésor, tu sais ce que tu fais. Chaque décision que tu prendras, bonne ou mauvaise, je sais dors et déjà qu’elle sera faite avec ton coeur. Et dès lors, elle ne peut être mauvaise. Encore une fois, oui, tu as le droit à l’erreur.

Je sais que ces mots ne seront que peu de poids. Je sais qu’ils sont trop courts et qu’il ne sauveront pas ton chagrin.
Mais je tenais à écrire ce matin tout ce qu’il me semblait essentiel de te dire.
Merci.
Je t’aime tant.
Merci.
Pour ces six années entre terre et paradis.

Ta fleur blanche,
Ta Daisy.