to the fools who dream.

(1) Elle est superstitieuse. Elle redoute particulièrement ses trente et un ans - plus que les trente - car ça fait treize à l’envers. Elle est capable de faire demi tour si elle croise un chat noir ou une échelle sur son chemin. Quant à ouvrir un parapluie à l’intérieur, oubliez. (2) Elle s’est déjà rendue en Afghanistan. Elle y a accompagné son chef pendant un mois à la fin de son internat. Elle a soigné des traumas qu’elle n’aurait jamais vu ailleurs, et puis elle a vu des blessures psychologiques certainement irréparables. Contre toute attente, elle s’est aussi faite draguer par un militaire sur place ou alors c’était une sacrée hallucination causée par le stress. En tout cas, elle a vécu un moment gênant, sous les yeux (quelque peu amusés) de son chef. (3) Elle a peur des clowns, depuis toujours. Bon nombre de ses confrères adorent cette fête qui amène son lot de folklores aux urgences. Claire s’arrange toujours pour ne pas être de service. Elle préfère rester chez elle devant Bridget Jones et de la glace, loin des clowns. (4) Mens sana in corpore sano, son premier et unique tatouage. En tant que médecin, elle estime qu’elle doit montrer l’exemple aux patients. Elle se force à prendre le temps nécessaire pour manger chaque jour cinq fruits et légumes (bio, bien sûr) et faire des exercices de yoga. (5) Elle se considère comme une citoyenne du monde. Avec un père diplomate, elle a grandi transportée de pays en pays, d’ambassade en ambassade. La famille a donc vécu à Wellington, puis Washington D.C., Ottawa et enfin Londres, dont elle a gardé l’accent. Claire est revenue à Wellington qu’au moment de commencer ses études de médecine. Elle n’en est jamais repartie depuis. Pourtant, sa carte frequent flyer est pleine à craquer de miles à dépenser. (6) Les violences faites aux femmes sont un combat dans lequel elle s’est engagée assez jeune. Bien qu’elle soit d’ordinaire rigoureuse dans son travail, elle accorde une attention plus particulière aux femmes battues et aux familles en détresse. Son premier cas de violence conjugale lui a fait un choc plus important que le premier décès qu’elle a déclaré. (7) Elle croit en Dieu. Élevée par des parents catholiques pratiquants, elle continue d’y croire. Si elle ne prend plus le temps d’aller à l’église toutes les semaines, elle s’y rend quand elle en ressent le besoin. En tout cas, la religion ne l’a pas empêchée de perdre sa virginité avant sa majorité et d’avoir occasionnellement des rapports sexuels alors qu’elle était en couple. (8) Elle a longtemps été maladroite. Aujourd’hui, elle se contente de se tenir éloigner de ce qu’elle ne sait pas faire et des activités dangereuses comme le surf, le roller et le skate. Au lycée, elle était plutôt le nez plongé dans la littérature - essentiellement française et américaine - et pratiquait la danse classique. (9) Une fois sa tenue enfilée, sa blouse sur les épaules et son stéthoscope autour du cou, elle devient impitoyable. Claire n’est pas arrivée jusque-là sans s’être fait quelques ennemis. End justifies the means, dit-elle. Maintenant, elle exige toujours plus des nouveaux internes qui passent par les urgences. (10) Elle est féminine, toujours ou presque. Si elle fait dans la simplicité - mais toujours griffée de la tête aux pieds -, elle est constamment en talons. À l’hôpital, où elle n’a pas d’autre choix que d’opter pour une paire de baskets confortables, cette féminité réside uniquement dans ses sous-vêtements cachés sous sa tenue. (11) Elle consomme très peu d’alcool. Elle s’est prise deux grosses cuites dans sa vie : une au cours de la soirée d’intégration en première année, une à la fin de son internat. Depuis, Claire préfère vin rouge de l’exploitation familiale, ou alors de grands noms quand elle sort. Elle se contente aussi de ramasser les alcooliques de passage aux urgences. (12) Derrière ses yeux de biches et ses pommettes saillantes qui accentuent un peu plus ses airs dédaigneux, il y a tout de même une once de gentillesse et de bienveillance, peut-être bien d’empathie aussi. Après tout, elle n’est pas devenue médecin sans raison. Malgré la compétition pour sa carrière, Claire donne parfois de son temps dans un dispensaire. Quant aux relations non professionnelles, tout est une question de carapace et de confiance donnée à l’autre partie. Dire que c’est un travail de longue haleine est un euphémisme. (13) Elle aime le rugby. Ça peut paraître étonnant, mais c’est un sport plutôt fédérateur dans sa famille. Un rendez-vous obligatoire. Elle est maintenant incapable de choisir entre le XV de France, le XV de la Rose et les All Blacks. Même lors de leur expatriation aux Etats-Unis et au Canada, ils ont continué ce genre de rituel et Claire n’a jamais rien compris le football américain ou le hockey sur glace. (14) Elle a été cocue trop longtemps, sans s’en rendre compte. Ils avaient failli se marier, jusqu’à ce qu’elle découvre l’autre femme par le plus grand des hasards. Claire n’a jamais eu autant envie de meurtre. C’est en partie pour cette raison qu’elle s’est davantage focalisée sur sa vie professionnelle pour accorder moins de temps aux relations amoureuses. (15) Elle prend les valeurs familiales très aux sérieux. Des parents, de l’amour, de la complicité, des enfants. D’ailleurs, elle admire ses parents, toujours mariés et amoureux. Aujourd’hui, elle se contemple encore dans ce tableau composé de ses parents et de sa sœur, sans avoir songé à fonder sa propre famille.

En vrac : elle a une addiction pour le café. + elle aime Beigbeder, Salinger et Cocteau. + elle n’a pas la patience pour cuisiner. + elle a déjà croisé Colin Firth à Londres et ne s’en est jamais remise. + elle parle couramment le Français et blablate en Espagnol. + elle n’a pas la main verte. + elle a déjà tué des poissons rouges, sans faire exprès, et refuse depuis d’adopter un animal de compagnie. + elle est gauchère. + elle a tendance à jurer en Français. + elle aime les crêpes au sucre ou à la confiture de mûre. + elle est incapable de s’empêcher de rire devant les shows d’Ellen Degeneres et Jimmy Fallon ou cette douée de Bridget Jones.