i was dreaming + alba

when magic through nerves and reason passes, imagination, force, and passion will thunder. the portrait of the world is changed.. ✻ La radio vibrait au fond de la pièce. Et la musique s’élevait comme un tourbillon. Elle s’embaumait dans l’atmosphère épaisse de Wellington. J’effleurais la surface du papier. Le stylo tremblait entre mes doigts. Parce que je n’avais pas de talent. L’encre se mélangeait aux tâches de graisse et de l’huile. Les engrenages mécaniques glissaient docilement sous mon pouce. Je parvenais à réparer les moteurs les plus compliqués. Mais l’inspiration refusait d’oblitérer le vide. Je fixais les essais de ma première pièce de théâtre. Je n’étais jamais satisfait. Les dramaturges étaient condamnés. L’art se mourrait sur les planches des salles abandonnés de la ville. Mais j’étais garagiste, j’étais loin de la malédiction des amoureux. Je soupirais en levant la tête vers la porte. J’attendais l’arrivée d’Alba. Sa silhouette se mélangeait dans la foule. Elle souriait avec allégresse, gratifiant ses clients d’un sourire aimable et bienheureux. Sa maison d’édition se trouvait de l’autre côté de la rue. Je voyais l’insigne et ses couleurs flamboyantes. Je rêvais de porter son nom, de mériter une place dans ses oeuvres. Mais les actes que je gribouillais n’étaient qu’une lubie enfantine. Une illusion de grandeur qui s’amenuisait entre les plis du papier. Les mots se nouaient autour de ma gorge. Ils se consumaient aux gré de mes soupirs. Je me redressais afin de saluer mon amie. Je n’étais que ça : un cas désespérant. Un artiste à encourager pour qu’un jour il ose s’envoler. J’étais simplement humain. Avec des défauts et l’envie de stagner. Les rêves étaient beaux tant qu’ils ne se brisaient pas. Alors je n’essayais pas de changer de carrière. Mon gagne-pain se trouvait sous le capots des voitures. Le reste n’était qu’une analogie. Un fantasme d’adolescent. Vivre au jour le jour.«J’ai pris deux thés. Tu mettais du temps. J’ai eu la flemme de congédier la serveuse. J’espère que ça ira.» Je souris en rangeant les manuscrits qui s’empilaient sur la table. Je les pressais, pliant les rebords pour tout cacher au fond de ma sacoche. J’avais honte de ces lignes. Je redoutais la force percutante de ces mots que je n’exprimais que dans les livres. Je redoutais son regard et l’éclat vespéral de ses prunelles qui se posaient sur mon visage. Interrogatrice. Confiante. Elle était la seule à comprendre le mal des écrivains.