We're leaving the things we lost, Leaving the ones we've crossed, I have to make an end so we begin, To save my soul at any cost
" The birth is the fatality of man ..."
Quand Vasil Vanchev arrive en Nouvelle-Zélande, c’était uniquement dans le but de développer ses trafics dans une partie de la planète où la concurrence ne semblait pas être une difficulté. Il ne s’attendait pas à tomber amoureux d’une néo-zélandaise au nom de Anna ni à ce qu’elle tombe enceinte de moi. Tatiana. Le petit bébé aussitôt promise à être l’héritière de l’empire criminel de la famille Vanchev. Mon père était fou de joie à l’idée d’avoir un enfant, un héritier mais était déçu en voyant la mignonne petite fille toute fragile que j’étais. Ma mère n’était pas plus heureuse, consciente de la future vie de sa petite fille, de son avenir. J’étais vouée à être en danger à chaque instant et elle ne supportait pas que je vive comme cela. Je pense que cette période où je n’étais qu’un bébé sera la plus paisible de ma vie et de celles de mes parents. Ils s’aimaient, c’était indéniable, tout ceux qui ont connu leur couple les décrivaient comme emplis de fougues, de passion et de tendresse. Mais à chaque année que je gagnais, leur relation se dégradait. Ma mère ne voulait pas de cette vie pleine de criminalité pour moi et mon père voulait respecter la tradition des Vanchev et que je sois l’héritière de cette famille qui s’est enrichie majoritairement grâce à l’illégalité. Ma mère a passé la majorité de cette période près de moi, me donnant énormément d’amour. Jusqu’à ce qu’elle fasse la plus grande connerie de sa vie par amour pour son enfant.
" Mother love is the only love that comes somewhat closer to divine love..."
Je l’ai dit, ma mère m’aimait d’un amour sans limite. J’étais la meilleure chose qui lui soit arrivée dans la vie après sa rencontre avec mon père. Le soir de mes cinq ans, une dispute éclata entre eux. Cela a toujours été flou mais dans le journal de ma mère, elle parle de la mention d’une chasse pour mes sept ans. Pour que je m’habitue à la mort, au sang. C’est une page qu’elle a sûrement eu énormément de difficulté à écrire. Je me souviens de la suite. Elle a tenté de s’enfuir de la maison avec moi. Anna Vanchev a vidé son compte en banque, fait nos valises de manière sommaire, pris de quoi boire et manger avant de m’attacher au siège enfant de son pick-up d’étudiante avant de rouler à grande vitesse pour quitter Wellington. Elle voulait m’éloigner de cette vie, de ce futur, de cet héritage maudit. Elle aimait mon père, de manière inconditionnelle mais elle ne pouvait accepter que sa petite fille trempe dans ses affaires sordides.
Mais je crois bien que ma mère a oublié les affaires de son mari cette nuit-là. Vasil Vanchev avait des ennemis, c’était bien évident. Lorsque ma mère s’est arrêtée à cette station-service pour faire le plein, elle n’a pas prévu que des membres de la mafia ennemie allait lui tirer dessus juste avant que les hommes de mon père arrivent à leur tour. Je ne sais pas comment je m’en suis sortie, je suppose que les hommes travaillant pour notre famille sont arrivés rapidement mais s’il y a bien un souvenir que j’ai gardé de ma mère, c’est celui de sa mort. Le reste n’est que vague, mon père m’a donné son journal intime pour que je puisse avoir l’impression qu’elle est toujours avec moi, quelque part. Depuis que je suis adolescente, j’écris à mon tour à l’intérieur. C’est sûrement idiot pour vous mais pas pour moi. J’aimerai toujours ma mère et c’est le seul moyen de me sentir tout près d’elle.
Le reste de mon enfance fut banal pour moi, dans la tradition des Vanchev. Mon père m’a bien emmené à la chasse le jour de mes sept ans et tous les dimanches qui ont suivi. Il n’était que rarement présent alors même si ces moments se passaient dans le silence, l’observation, le meurtre d’un animal et le sang, j’aimais être avec lui chaque dimanche. A l’école, j’étais la première de ma classe, ayant des professeurs particuliers. Mon père voulait le meilleur pour moi. Il m’a inculqué ses valeurs, a engagé des professionnels pour que je sois irréprochable, présentable, cultivée et souriante. Et à côté de ça, il me faisait prendre des cours de boxe quand j’eus treize ans. Avec tout ça, je n’avais que peu d’amis. J’en avais, du moins les vulgaires amis d’école, je n’étais pas seule mais je pouvais me plaire dans ma solitude.
Quand j’eus quinze ans, mon père se remaria. Eva Vanchev, ma belle-mère n’était pas le modèle de la mère parfaite au début. Elle s’est débarrassée de toutes les photos de ma mère et a rapidement pris ses aises à la maison. Je la détestais et du haut de mes quinze pommes, je n’hésitais pas une seconde à la provoquer et la faire sortir de ses gonds. Entre nous, cela a été la guerre durant des années. On ne se supportait que très difficilement, si bien que mon père envisageait de me prendre un appartement lorsque j’aurai atteint la majorité.
" Teenagers are the most ignoble beings in the world..."
Le lycée est probablement l’endroit le plus animal que où j’ai mis les pieds dans toute ma vie. Moi, à la tête de la branche néo-zélandaise de la mafia de mon père, considère le lycée comme le lieu le plus mortel et monstrueux. Les adolescents sont des animaux qui se bouffent entre eux, des monstres avides de pouvoir et on le remarque bien vite lorsque nous sommes cette fille dans un coin du couloir qui observe. Tous les jours, je voyais les souffres douleurs du lycée s’en prendre plein à la tête par les plus populaires. Cliché, non ? Mais c’est bel et bien la vérité. Comment devient-on populaire ? Certes certains le deviennent par leur gentillesse, leur sens du devoir, quand ils se baissent pour aider cette pauvre fille timide à ramasser ses livres éparpillés au sol. Oui ceux-là sont honorables. Mais la plupart des populaires que nous avons connu le sont devenus par la méchanceté. Ils installent un climat de peur sur certains élèves, la plupart sont doués et ils ne vivent que par cela. Méchanceté et le peu de talent qu’ils ont.
Je n’ai pas été harcelée à ma première année de lycée. Je me contentais d’observer et rester silencieuse. Je n’étais pas rejetée, je faisais partie du club de natation du lycée et j’étais très bonne. J’avais des amis grâce à ce club, j’adorai également filmer avec de vieilles caméras, j’ai d’ailleurs participé à la réalisation du documentaire pour le lycée. Je pense que vous l’avez compris, ma première année de lycée s’est bien passée. A côté de ça, j’avais tiré pour la première fois et prenais désormais des cours de tirs en plus de ceux de combats. J’avais une vie bien remplie, loin de ma belle-mère et des gros cons du lycée. J’entrais doucement dans le monde de mon père, accompagnant ses hommes pour des petits trafics. Je me faisais à ce monde et je m’y faisais vite.
C’est durant ma deuxième année et encore après que les monstres du lycée ont su que j’existais. Il faut dire que le sublime crochet du droit que j’ai asséné à un petit con de quaterback a pas mal attiré l’attention. Pourtant je lui ai bien dit d’arrêter de mater ma poitrine comme un porc. Depuis ce jour, tout le monde m’avait remarqué. Certains m’avaient admiré, d’autres ont été apeuré, les monstres m’ont détesté. Je me souviens de tous ses mots barbares glissés dans mon casier avant qu’on me plaque contre celui-ci. Je me souviens de ces bousculades en cours de gymnastique, de ses moqueries que j’entendais dans mon dos. Pourtant je n’étais pas comme les autres souffres douleurs à me taire. Je parlais, je montais fort dans les tons et la provocation. Certains le lendemain revenaient le visage plein de bleus tant je les avais malmené deux jours auparavant. Tout le monde savait que c’était moi mais le peu de fois où on m’a dénoncé, je n’ai pas été inquiétée. L’avantage de n’avoir aucune preuve et un père puissant.
Je pense que vous l’avez compris, mes années de lycée m’ont dégoûté de l’humains et mon côté bestial s’est réveillé à ce moment précis de ma vie. Je n’avais confiance en personne, du moins pas assez pour m’ouvrir entièrement. Je me contentais de vivre ma double vie. Celle d’une adolescente trop grande-gueule et celle du futur danger public que j’allais devenir.
" Take me back to the night we met..."
J’étais dégoûtée par l’humain rapace et fourbe. Pourtant j’ai rencontré quelqu’un durant ma première année d’université. Autant mon salut que ma malédiction. Un soir enneigé, un soir en plein mois de décembre. J’avais besoin de décompresser, de m’éloigner de la demeure familiale un temps. Et il est apparu, tu es apparu. Tu m’as semblé comme un putain d’arrogant philosophique qui ne cessait de parler, assis à côté de moi sur ce banc. Tu ne savais qui j’étais et je ne savais quel homme tu étais et à quel point nos identités allaient nous perdre. Mais toute la nuit tu as parlé, comme si tu étais une machine qu’on ne pouvait stopper. Je voulais te tuer, réellement je voulais sortir mon couteau suisse et mettre fin à ses paroles. Mais malgré tout, je suis restée sur ce banc à t’écouter et à regarder la neige. Tu m’as arraché une parole, une pique. Le soir suivant tu étais là avant moi. Je me suis assise et j’ai à nouveau regardé la neige. Nous sommes restés silencieux un long moment, jusqu’à ce que je parle, agacée par ce silence. Tu m’as encore fait parler. Tu as pris ce rôle que j’occupais depuis trop longtemps. Celui qui écoute et se tait. Tu m’as fait énormément de bien, j’ai pu me libérer de plusieurs poids. Nous ne connaissions toujours pas l’identité de l’autre. Nous nous sommes revus sur ce banc tous les soirs durant si longtemps. Nous ne remarquions pas l’arme caché dans le manteau de l’autre, nous ne voyons pas les quelques taches de sang qui marquaient parfois nos vêtements. Non, nous ne voyons rien. Juste à quel point nous avions établi un lien, une connexion absolument indescriptible et qui me faisait peur. Pour la première fois de ma vie, j’ai perdu le contrôle. Je le perdais de plus en plus. Lorsque tu m’as invité à notre premier rendez-vous, lorsque nous nous posions sur notre banc, lorsque tu m’as embrassé, lorsque nous avons couché ensemble. On ne savait même pas si nous étions en couple, nous avons juste laissé les choses faire sans poser de questions. On était explosif ensemble, tous les deux des bêtes cachées, dangereux pour l’autre sans en être réellement conscients. On était provocateur, c’était le feu mais à côté de ça la passion et la tendresse nous animaient tout autant. Jusqu’à ce qu’on apprenne enfin l’identité de l’autre.
Lors d’un échange qui a mal tourné entre deux mafias dont celle de mon père. Lorsque je me suis avancée et que j’ai senti le couteau pénétrer ma peau. Quand je t’ai vu derrière, hurler à cet homme qui venait de poignarder qu’est-ce qu’il avait fait. Quand j’ai su que cet échange se faisait avec la mafia ennemie. Tu étais le fils de notre plus gros concurrent. Et moi je me suis écroulée sur un sol non pas recouvert de neige mais enveloppé de mon sang qui emportait mes rêves et mes désillusions. Après ça je ne suis plus jamais revenue sur le banc. Après ça je n’ai plus fait confiance à personne. Après ça j’ai verrouillé mon cœur et ai bâti une muraille autour pour ne laisser entrer que les personnes loyales et sincères. Mais quand il neige, je pense encore à toi.
" We fight every night for something..."
Le cœur lourd, l’impression d’avoir trahi les miens, voilà comment tu m’as laissé. Mais je t’ai laissé dans un coin de ma tête et je me suis prise en mains. J’ai dit à mon père que tu m’avais dupé, trompé alors que nous avions tous les deux étés dupés par le destin. Mais je te détestais à ce moment de ma vie et je pensais réellement mes paroles. Aujourd’hui je réalise que peut-être je me suis trompée. Mais je ne reviendrai pas sur des possibles mensonges survenus il y a huit ans. Je ne t’oublierai jamais et je sais que je t’ai marqué, moi aussi.
Mon père m’a aidé à me reprendre en main. Il connaissait les peines d’amour bien que j’ai dû à concevoir que j’ai pu tomber amoureuse aussi facilement. Dès que j’eus mon diplôme, mon père me plongea directement en plein cœur des affaires. Légales comme illégales. Il m’a tout appris. A camoufler mes traces, à me battre, à me montrer persuasives…de toutes les manières possibles et imaginables. Je suis devenue aussi douée que lui dans ce domaine voir meilleure. Je tire les ficelles, je commande tout cet empire d’une main de maître. Je me sens vide à l’intérieur mais à l’extérieur tout me réussit. Je me fais très vite un nom comme l’héritière brillante de Vasil Vanchev. Oui, tout me réussit. Peu importe la manière que je dois appliquer pour arriver à mes fins, peu importe le nombre de cadavres dans mes placards, je m’en cogne. Je gère mon business comme une reine et je continuerai à agir ainsi au détriment de mes sentiments. Lorsque vous me verrez, vous ne saurez pas à quel point je suis dangereuse et arrogante, à quel point je pourrai avoir envie de vous faire taire de manière peu légale. Vous me verrez comme cette femme brillante qui a réussi ou comme cette simple joggeuse qui court un long parcours avant de s’acheter un muffin dans le café du coin. Je suis devenue un monstre…sûrement pire que ceux du lycée pour vous. Si vous le dites, je m’en fiche pas mal.
" For you, the all world can burn in hell…"
Quand j’eus vingt-quatre ans, ma belle-mère accoucha d’un petit garçon nommé Stefan. Aujourd’hui il a quatre ans depuis le premier avril. Il est ma nouvelle source de bonheur. Je l’aime comme une mère, puisque la sienne n’a pas été foutu de s’occuper de lui et a quitté le domicile familial après que mon père ait découvert qu’elle le trompait. Eva avait sûrement peur pour sa vie. Elle faisait bien. Mon père ne l’avait jamais tué mais je l’aurai fait sans aucune hésitation. Elle a lâchement laissé Stefan derrière elle et je suis devenue sa mère de substitution. Je suis plus qu’une simple sœur à ses yeux, je suis celle qui s’occupe de lui, lui lis des histoires. Même si désormais je n’ai pas beaucoup de temps à lui accorder, je me réserve toujours des journées consacrées à mon petit frère. Mon père aime notre complicité, il aime que je m’occupe de Stefan comme si ma vie en dépendait. Il y a un an il a décidé de quitter la Nouvelle-Zélande pour s’occuper à nouveau de son business en Bulgarie. Il m’a confié toute la branche néo-zélandaise de nos trafics et nos affaires, il a confiance en moi et sait que je ne flancherai pas. Je n’ai aucune faiblesse, mis à part Stefan mais je le protège même de loin, j’ai les moyens pour. Je pense que mon petit frère est ma seule faiblesse mais loin de là, j’en ai d’autres dans cette muraille que j’ai forgé autour de mon cœur. Je suis affectée par une pauvre fille dans le besoin, par un mendiant dans la rue. Je donne à des associations caritatives, je tente d’aider les plus démunis et si je pouvais, je ferai sûrement un voyage humanitaire. Je fais des cauchemars la nuit sur la mort de ma mère, une possible horreur qui arriverait à Stefan, à celui qui a brisé mon cœur il y a presque dix ans. Quand je suis seule, je reste cette humaine fragile, comme nous le sommes tous. Mais à l’extérieur, vous penserez sûrement que je suis une des femmes les plus fortes que vous n’ayez jamais rencontré. C’est mon talent, de me cacher, de cacher qui je suis. Mais aussi une faiblesse dont je n’ai pas encore conscience.