the family business (Los Angeles) 1993-2009
Des cris de nouveau né se faisaient largement entendre dans la clinique de Los Angeles. Une petite merveille aux yeux de l’homme qui passa une main distraite dans ses cheveux bruns qui grisonnaient de plus en plus. Du haut de ses trente huit ans, son visage mât commençait à être marqué par la fatigue du travail mais également des responsabilités qui le faisait sans cesse et sans répit courir. Il se laissa tomber contre le mur blanc. Sa seconde main rejoint à son tour ses cheveux poivre et sel. Il soupira. Il était fatigué mais maintenant que sa fille était née, il était bien décidé à l’assumer. Ses yeux bleus se fermèrent. Il voulait réfléchir tranquillement, s’enfermer dans sa bulle mais il redescendit rapidement sur terre en sentant la main de sa femme s’agripper à sa chemise faite sur mesure. Discrètement, il lâcha un nouveau soupir et, alors qu’il ouvrit les yeux, il afficha sur son visage, au travers de sa barbe naissante, un sourire. Il se redressa et posa un regard bienveillant sur la tête brune. Le sourire de l’homme s’agrandit légèrement à cette vue. Dans un geste lent, le regard bleuté du patriarche se posa sur une sage femme qui arrivait. Sa charlotte sur la tête, sa blouse tâchée, elle retira ses gants dans une lenteur extrême, presque exagéré. L’homme se dressa, devenant droit comme un « i », attendant simplement qu’elle vienne lui parler. «
Votre fille se porte merveilleusement bien monsieur et madame Donovan . » ce sont les seuls mots qu’elle prononça dans un demi-sourire avant de finalement tourner le dos à l’homme.
(…)
Elle se trémoussait sur une table. D’un coup de pied rythmé sur la musique, elle fit tomber un verre de champagne. Le liquide tâcha la robe d’une fille éméchée qui était étalée sur le sol, incapable de rester debout. Cette vision déclencha les rires d’une Rán loin d’être dans son état normal. Du haut de ses quinze ans, elle avait tout d’une grande. Loin d’elle l’image de la fillette de huit ans qui frappait tout les plus petits qu'elle à l’école, sans le moindre scrupule. Loin d’elle la vision de la gamine brisée par la vue de ses parents qui n'ont pas le temps de se soucier d'elle et de son frère. Loin d’elle l’image lisse et calme qu'elle affichait devant ses parents. D’un énième coup de pied, elle envoya valser ses escarpins hors de prix. Elle releva la main qui tenait une coupe de champagne pleine vers son visage. En quelques gorgées seulement, la coupe se retrouva vide. Rán tournait sur elle même puis lâcha par inadvertance la coupe sur le sol qui se brisa sur le coup. Elle éclata de rire et, dans un saut léger, descendit de la table.
Les yeux dans le vide, elle observait la pourriture déposée sur le plafond un peu trop blanc de son immense chambre. Ça tourne un peu, parce qu’elle n’avait sûrement pas assez mangé pour ce qu’elle avait bu. Et les coups contre la porte retentissaient dans sa tête, ça résonnait et ça faisait terriblement mal. Elle avait envie de hurler, mais ses poumons manquaient d’air et elle se surprit bloquée au milieu d’une atroce quinte de toux. Trop de nicotine, pensa-t-elle en étouffant un atroce rire. Elle ferma les yeux et son cœur battait au rythme des coups contre le bois de la porte. Elle n’avait aucune envie de se lever ; ça faisait trois jours que c'était comme ça. Il faudra bien, pourtant. Qu’elle aille manger un truc, soulager ses poumons en inspirant un air pur et bien plus sain que celui dans lequel elle nageait. Misérable poisson prêt à se noyer d’une seconde à l’autre. Et, d’un seul grand coup, la porte finit par s’ouvrir, lui brûlant la rétine au passage ; ça faisait trois jours qu’elle n’avait pas vu la lumière de ce long mois de juillet.
«
je t'ai pas entendu me dire de rentrer mais… » Elle pouvait voir dans les yeux de son visiteur inopiné l’étonnement de découvrir un lieu aussi… Sale. Il n'y avait pas de meilleur adjectif et, tandis que son frère s’avançait doucement dans la pièce, Rán finit par ouvrir des yeux rouges vifs sur lui, avant de lui balancer d’une voix complètement brisée. «
T’es en manque, c’est ça ? » Il ne lui avait pas fallu plus de cinq secondes pour comprendre sa présence et, de toute façon, personne ne venait la voir pour d’autres raisons. Même son frère avec qui elle ne s'entendait absolument pas. «
Ouais. Ça fait un moment qu’on t’as pas vu et c’est un peu la merde en ce moment. El mochomo devient dingue en plus de ça. Donc si tu pouvais m’dépanner et revenir ce serait bien » Rán se relèva d’un seul grand coup et, tandis qu’elle réalisait la bêtise de son geste, elle se permit de dissimuler son malaise derrière un rictus énervé. «
Ecoute, y’a pas que moi dans le réseau. Il y a des dixaines d’autres gosses qui vendent la même merde que moi. Ou alors va en demander à l'autre qui nous sert de mère. Ca se trouve elle aussi elle est dans le business » Noyée sous un flot de reproches, elle n'était plus capable d’entendre son drogué de frère qui lui parlait de question de vie ou de mort. Elle n’en avait ni l’envie, ni le courage. «
Bon gros camé, va chercher ta merde ailleurs, j’ai rien pour toi et j’aurais plus jamais rien pour ta sale gueule de gros drogué, maintenant tu dégages de ma chambre ou cette histoire se terminera mal. Je te mets dans un trou avec El Mochomo . J’en ai pas pour une journée et après vous serez rayés de la surface de la terre et on en parle plus. Alors dégage d’ici et va chialer ailleurs. »
it's my dilemma (Los Angeles) 2009-2013
Il y avait deux façons d’atteindre le nevada, une balle dans la tête ou bien connaitre Rhea Dardo. Elle l'avait rencontré au collège et il ne lui avait pas fallu longtemps avant de devenir amie avec la brune. Depuis ce jour, elles étaient devenus inséparables. Un duo à la Bonnie and Clyde - mais Clyde sérieusement efféminé. Au début, elle avait été aussi délicate et jolie qu'une fleur venant d'éclore. Rán l'avait aimé à la première seconde et s'était de suite bien entendue avec elle. Qui l'eut cru ? Rán, amie avec quelqu'un. Puis elle l'avait entrainé dans le cercle vicieux qu'était le trafic de drogues après lui avoir promis monts et merveilles, lui avoir dit que ce serait juste pour s'amuser. Mais Rán avait changé avec les années, le masque était tombé. Son amour pour l'argent avait grandit. Rán devenait cupide et avare. Plus rien ne la préoccupait hormis l'argent et son petit trafic et avait utilisé Rhea sans scrupule afin de revendre sa marchandise grâce à ses contacts à WeHo.. Juste pour quelques billets. Et aujourd'hui, toutes les deux devant leur avocat, elle regrettait amèrement. Mais elle n'en dirait rien. Par fierté. Alors elle lui avait peut-être offert des soirées d'été inoubliables lors de leur spring break mais c'était de sa faute si à présent elle était dans ce pétrin avec elle.
Toutefois, grâce à tout ce qu'il s'était passé, Rán était devenu une jeune femme remarquable, avec ses défauts sans aucun doute. Elle n'était plus une gamine en mal d'amour-propre, elle appartenait désormais au monde cruel des adultes et ici il valait mieux être accompagné que seul. Cette fille lui avait maintenu la tête sur les épaules. Simplement, elle avait besoin de Rhea dans son quotidien, dans sa vie de tous les jours, car elle en était une pièce essentielle. Cependant, c'était entièrement de sa faute si elles en étaient là aujourd'hui. Elle se souvenait parfaitement du jour fatidique. Rán se revoyait discutant avec son oncle El Mochomo ainsi qu'avec son homme de main d'un client prêt à acheter une somme pharamineuse de leurs petits cristaux incolore. De la méthamphétamine pure à 98%, du jamais vu dans le pays. Pour eux, c'était l'affaire du siècle. Ils allaient faire fortune et devenir les rois du monde. Rán n'avait pas hésité une seule seconde avant d'en parler à Rhea. Elle était incroyablement douée pour transporter la drogue et il fallait avouer qu'elle était devenue indispensable dans le réseau. Minuit tapante, le client s'était pointé avec une valise à la main contenant plus de billets que Rán n'avait pu gagner durant sa misérable petite vie de transporteuse. L'homme de main de El Mochomo s'était avancé, lui aussi une valise à la main qui contenait non pas de l'argent mais la marchandise. Rán était restée dans la voiture, guettant le moindre problème pouvant surgir à tout moment. Le temps passait incroyablement lentement et l'homme de main de son oncle était anormalement long. Quelque chose n'allait pas. Les ordres avaient été on ne peut plus précis. El Mochomo devait être arrêté et son business, réduit à néant. Toute personne s'interposant entre lui et les autorités devait être arrêtée. El Mochomo devait être ramené vivant pour qu'il puisse payer pour ses méfaits. «
C'est quoi ce merdier ? Qui nous a balancé ? » avait-elle hurlé avant de démarrer la voiture aussi vite que possible. Trop tard. L'homme de main venait d'être arrêté et une masse de voitures de la brigade des stup leur bloquaient la route. C'est donc dans les détails que Rán avait tout raconté à leur avocat, Rhea de son côté également. Bien évidemment, la jeune femme avait soigneusement évité de mentionner son oncle, affirmant qu'elle ne connaissait que l'homme de main. «
Très bien, je vais m'entretenir seul avec vous mademoiselle Donovan. » finit par dire l'avocat. Un homme de la brigade des stupéfiants vint chercher Rhea avant de quitter la pièce avec elle quelques secondes après. « J
e m’entretiendrais avec votre amie ensuite mais tout d'abord, il me faudrait des renseignements plus précis. Sans quoi je ne pourrais vous aider. » Rán, complètement déboussolée de se retrouver seule, rester aussi silencieuse qu'une carpe. Elle savait qu'il y aurait des conséquences pour Rhea et elle si l'une des deux balançait El Mochomo. «
Si vous me donnez le nom de la personne à la tête de tout ceci, je ferais en sorte que votre peine et celle de mademoiselle Dardo soit considérablement réduite. De plus, vous étiez mineures lors des faits. » Impossible de le balancer, ce type était bien trop connu dans le milieu pour qu'il se fasse avoir par deux gamines mais surtout intouchable. Alors elle resterait silencieuse. Tout du moins jusqu'au retour de Rhea. Espérant que de son côté, elle n'ait rien dit sur El Mochomo non plus... Et elle partirait loin de tout ça, loin de son oncle mais jamais bien loin de Rhea