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Je suis le petit dernier d'une fratrie de six enfants. Autant vous dire que mes parents étaient débordés par leur travail. Il fallait bien nous nourrir et nous vêtir. Ils comptaient naïvement sur les ainées pour s'occuper de moi mais mes soeurs étaient bien trop occupées à flirter et à étudier pour pouvoir avoir une chance de décrocher une bourse d'étude. Je restais souvent seul avec pour seul compagnon mon ours en peluche, hérité d'un de mes frères, à qui je racontais des histoires. Il fut mon plus fidèle spectateur et il me permit de développer mon imagination. D'ailleurs, je l'a toujours conservé, il est rangé dans une boite et est sur le point de tomber en morceaux.

Le jour de mes quinze ans, mes parents m'annonçèrent notre déménagement à Wellington. Je n'avais aucune envie d'y aller. J'étais d'une nature conciliante mais là, je me mis en colère. Je ne voulais ni quitter mes potes ni le lac Wakatipu où nous pratriquions le saut à l'élastique, le rafting, le parapente et le saut en parachute l'été et nous profitions de la saison hivernale pour aller glisser sur les pentes enneigées des "Remarkables". J'étais accro aux sensations fortes et à la nature et je le suis toujours.

Quelques mois avant ma majorité, j'ai rejoint un groupe de jeunes du quartier. Ils m'apprirent à me battre, à escalader les façades des immeubles pour commettre des petits larçins et malheureusement, je me fis chopper lors de ma première tentative de cambriolage. C'était mon premier délit et étant encore mineur, je ne fus condamné qu'à six mois de détention dans un centre au Nord de Wellington. Cette colère, cette rebellion, cette force brute, j'ai réussi à la dompter, à la museler mais elle attend dans l'ombre qu'un évènement lui permette de se réveiller.

Un nom "Danyon Swanepoel", un des rares bénévoles impliqués dans ce centre de détention. Il décela mon potentiel artistique et il m'apprit certaines techniques, à me servir de fusain, de pastels. Il me disait toujours de fermer les yeux et de visualiser ce que je voulais créer. Il se rendit vite compte que j'avais de l'or au bout des doigts  et il me montra comment modeler à partir d'argile les animaux, les personnages qui venaient hanter mes songes et mes pensées.

A ma sortie, il m'aida à trouver un boulot de vendeur, dans une boutique de matériel sportif et le soir, je suivais des cours de littérature, de mythologie maori, d'arts plastiques, de théâtre. Je m'épanouissais au contact de jeunes artistes et ma rage, ma frustration s'éteignaient tout doucement. Je lui dédiais ma première exposition où un amateur d'art m'acheta ma création représentant "Hine-nui-te-pō", la déesse de la nuit et de la mort.

J'aimerais accompagner mes potes pour faire de la spéléologie mais j'en suis incapable. Je reste paralysé rien qu'à l'idée de mettre une main, dans un tunnel tortueux, alors mon corps en entier, impossible. Claustrophobe depuis que je suis haut comme trois pommes, j'ai essayé de vaincre cette phobie, avec l'aide de spécialistes, mais pour le moment, je n'ai pas réussi.

Je parle norvégien. J'ai découvert le pays de ma mère en offrant un pied à terre à mes parents, dans la ville de Sauda. Je me suis passionné pour les légendes de ce pays et je collectionne les livres de contes.

Amateur de bons crus et de mets délicats, j'ai pris des cours de cuisine et d'oenologie. Cuisiner me détend et me permet d'associer de nouvelles saveurs et de les marier avec des breuvages originaux.

Et les femmes dans tout ça ? J'étais loin d'être un moine mais aucune de mes conquêtes ne compta avant de rencontrer Elena. Je savais qu'elle était mariée alors je contenais, avec beaucoup de difficulté, mon attirance pour cette magnifique rouquine. Au fur et à mesure de nos rencontres, une alchimie intellectuelle se créa et je tombais amoureux d'elle sans m'en rendre compte. Elle avait emprisonné mon coeur avant même que nous échangions notre premier baiser.

Et aujourd'hui, nous vivons ensemble et je suis heureux. Non, pas totalement à vrai dire, elle refuse de devenir ma femme et d'avoir un enfant. J'essaye de la comprendre mais j'aimerais tant créer une famille avec elle. Elle est mon âme soeur mais ressent-elle la même chose ? Je ne peux m'empêcher de penser qu'elle est toujours amoureuse de son ex-mari. Ezio est son premier amour et il est difficile de l'oublier.