got my head up in the flowers - andrea

I. PARTICULES
Je peux étaler ma culture, parsemer mes conversations de pétales intellectuels, ramassés au gré des logorrhées d’autrui. Je peux prétendre connaitre les tenants et les aboutissants du monde. Je peux t’emmener dans en promenade politique, dégueuler mes paillettes d’homme d’Esprit. Confettis d’intelligence mimée, je les lance lorsque que je n’arrive pas à donner corps à mon récit. A la fin du jour j’expulse tout avec un va-et-vient animal de ma main, j’essuie. Une perte de sens, puis le sommeil.

Ces choses se transforment en absence de chose dans la nuit. Comme ces particules qu’on commence à voir lumière éteinte. T’es même pas convaincu de leur existence, et après tu te demandes pourquoi, tu te dis que tu chercheras demain, mais peut-être pas en fait, parce que personne en a rien à branler de la science au réveil.

II. TATOUAGE
Je veux savoir ce qui est dissimulé entre les traces d’encre, dans ces parcelles de peau blanche, virginales. Je veux lire les silences des contours. Bien sûr qu’il a déjà été touché à cet endroit. J’ai lu – ou peut-être c’est un de ces postes de merde que ta mère poste surement sur son mur facebook – que les murs détiennent l’écho du passé. Qu’est-ce que tu caches sur toi ? Qu’offres-tu à la découverte sur cette partie de toi, pressée entre l’écart de mes deux lèvres ? Si je pousse, un peu plus loin, que verrais-je ?

III. ANTIGONE X
Encore une fois, cette pensée dégomme ma carcasse, échine qui tremble, puis je me dis que je suis certainement fou, puis je me dis que je suis trop fou et que je ne devrais pas être en train de t’embrasser, que tu vas te rendre compte que je suis trop fou, que je suis trop fou et trop proche. Apres tu vas me pousser, tu m’as déjà poussé par le passé, tu dis toujours que tu le regrette, que tout est de ta faute. Vraiment ? Ta faute ? Est-ce que quelque chose en moi t’a donné la gerbe ? C’était enfin devenu trop pour toi, cette charité forcée ? C’était trop d’aider une gueule cassée ? Quand tu me touches ici, je ne peux pas arrêter, je ne peux pas m’empêcher de penser que tu es aveugle, ou que quelque force de quelque part me transforme en une chose acceptable, mais mec, je ne suis pas acceptable. Je suis un arnaqueur, une putain de sirène, et j’ai hurlé pour que tu viennes, et t’as adoré, putain, tu en as redemandé, merde ! Fin du sortilège. Finish. Tu me pousses, ça y est. Trop proche, trop fou.

Abandon, Deuil, Agonie. Putain de Sainte Trinité qui chante leur hymne-nausée et éclate ma tronche. Bacchanale dans le squelette. Je veux qu’elle la boucle, la trinité. Mais les hurlements me valident. Sans les cris je cesse d’Etre. Les pleurs rendent tout réel, un pansement qu’on arrache et qu’on remet, qu’on arrache et qu’on remet. Le drame, c’est ce qui fait que tu ne disparais pas complètement. Comme je suis dégueulasse, là-bas, agenouillé – Antigone de la génération X qui pique une crise au milieu de ta chambre. Demain, je me donnerai un certain crédit pour ma performance. Je te jure que je ne faisais pas semblant bébé, je les ai tous ressentis ces putains de sentiments, oh comme ils m’ont brisé les cotes hier soir… !

IV. Fifty-Fifty
Je me demande si la raison pour laquelle tu as voulu faire autant de choses hier soir, c’est parce que tu savais qu’il n’y aurait qu’un soir. J’essaye de pas trop penser, putain, je te jure que j’essaye. Si j’écris tout, c’est pour pas être encombré pendant la journée. Je me sens à moitié morose, à moitié triste, à moitié désespéré, à moitié agacé. A moitié tout. J’ai l’impression de vivre le monde au travers d’une combinaison d’apiculteur. Les abeilles sont dedans. Bzz. Elles piquent pas. Elles croient que je suis l’un d’entre elles.

Est-ce que t’as tout planifié¬ ? T’as décidé de me montrer un spectre incroyable d’émotions, toutes les teintes de ce qu’on pourrait être ensemble ? Productivisme bien senti, putain de balade, amour puéril à l’aube, parler du futur à midi, rupture-coucher de soleil. ‘’Tu es mien’’, puis t’ajoutes ‘’Je suis tiens’’ le lendemain. Maintenant j’ai l’impression d’avoir été dépossédé de quelque chose que j’ai jamais vraiment eu. J’en ai marre d’empiler ces petits vides. D’être la salope d’essai, le modèle d’exposition qui donne l’idée du vrai modèle. Si on m’achète un jour, ça sera parce que je suis cheap. Je veux même pas qu’il revienne. Enterre-le maintenant. Ça fera mal moins longtemps.

V. DOMMAGE COLLATERAL
C’est facile de me le faire, non ? Cible facile – je reste planté devant le viseur –, satisfait de peu, ému pour peu. Je suis un moyen, gentille et docile pierre de touche. Ils adorent m’utiliser. Comme ça ils savent où ils en sont. Baise rapide et ils retournent vers leur ex.

Ils me laissent cul-nul, comme un gros con sur mon pieu. Ils s’en tapent. Pourquoi en auraient-ils quelque chose à foutre ? Je me donne à eux. Je me fais toujours croire qu’ils voudront plus.

Nah. Ils m’essaient, me tentent. Et après ils se cassent. Ils se cassent satisfaits parce que maintenant ils savent où ils vont.

Ça va s’arrêter un jour, ça ? Jusqu’à quand est-ce que je peux le supporter ?