You were born to be real, not to be perfect.
Elle entendait encore les cris de sa sœur résonner dans sa tête. Elle se revoyait en train de plaquer ses mains contre ses oreilles pour ne plus avoir à l’entendre brailler. Elle n’avait que quatre ans, comment aurait-il pu en être autrement. Ses parents étaient rentrés quelques jours auparavant avec un cadeau qu’elle n’avait pas imaginé ainsi. On lui avait parlé d’une petite sœur, pas d’une sirène d’alarme. Et pourtant, elle l’avait aimé sa petite sœur. Elle avait fini par se taire, par se mettre à rire lorsqu’elle faisait l’idiote devant elle, par marcher et jouer avec sa grande sœur. Oh oui, elle l’avait aimée et ce fut le cas pour tous les autres qui arrivèrent par la suite. Ses parents n’avaient pas lésiné sur la descendance. Son père avait toujours rêvé d’une famille nombreuse, un peu comme si c’était le modèle à suivre dans les familles protestantes. Le fait est qu’après avoir accueilli Aileen dans la famille, ce fut le tour de Michaela, et les jumeaux Kieran et Oonna. Le jour de la première diffusion de sept à la maison, elle se souvient encore que son père s’était mis à pester sur le fait qu’ils s’étaient inspiré de leur famille. Le fait est qu’il avait beau être très pratiquant, il n’était pas pour autant pasteur. Au moins, cela avait eu le mérite de faire rire toute la famille alors que son père était loin d’être un gai luron en temps normal. Ce n’était pas la famille parfaite, elle en était bien consciente mais elle les aimait tous. Comment aurait-il pu en être autrement étant donné qu’elle les avait quasiment tous élevé. Si son père avait envie d’une grande famille, il n’avait pas forcément pensé au fait que cela demandait d’avoir une situation financière confortable. Il n’y avait probablement pas réfléchi lorsqu’il avait décidé d’aller travailler en Nouvelle-Zelande. A cette époque, il n’avait qu’une seule enfant. Elle venait d’avoir un an lorsqu’il est parti travailler dans un cabinet de préservation de la nature à Otaki, sa femme et sa fille restant dans leur Irlande natale. Les souvenirs de cette époque ne sont pas des plus frais dans sa mémoire. Elle se souvient de quelques touches flous, des tâches de couleurs vertes, des oncles parlant fort autour d’une table. A chaque fois qu’elle tentait de repenser à cette époque, elle était teintée d’une véritable aura de bonheur. Une aura qu’elle ne retrouva plus jamais vraiment à partir du moment où elle quitta le pays à ses trois ans. Son père avait enfin réussi à avoir le statut de résident permanent et avait pu faire valoir ses droits pour sa famille.
Son enfance fut bercée par la Nouvelle-Zélande mais aussi par l’affluence de ses frères et sœurs. La maison était toujours bruyante et animée mais lorsqu’elle eut neuf ans, les voix de ses parents finirent par s’éteindre dans cette maison qui aurait dû être un centre de bonheur. Avec deux nouveaux bébés en route et une grossesse difficile, sa mère devait garder le lit et son père avait fini par trouver un nouveau boulot un peu mieux payé mais qui le forçait à être en déplacement à Wellington toute la semaine. Alors forcément, ce furent les épaules d’Elie qui durent porter le poids d’une famille. Elle n’avait même pas encore dix ans qu’elle était obligée de faire à manger pour ses petites sœurs et d’appeler le médecin lorsque sa mère ne se trouvait pas bien. Elle avait fini par prendre la place de sa mère et de son père dans le même temps, organisant tout ce qui devait l’être dans la maison, préparant le déjeuner de ses petites sœurs et elle pour l’école, faisant en gros tout ce qui incombait normalement à ses parents. Ce fut sûrement à ce moment là qu’elle s’éloigna des idées religieuses de son père. Personne n’était venue l’aider à gérer tout ça alors qu’elle n’était qu’une enfant, aucune force ne lui avait donné un coup de main, elle s’était juste retroussée les manches parce qu’elle savait que c’était la seule chose qu’il y avait à faire. De plus, elle en voulait à son père de les avoir laissé, de ne pas avoir pris le temps de rentrer plus souvent pour l’aider, pour s’occuper d’eux comme il aurait dû le faire. Elle perdit peu à peu son sourire à cette époque, trop occupée à tout gérer pour trouver le temps de rire et de profiter. Son âme d’enfant était déjà perdue avant même d’avoir pu prendre conscience qu’elle pourrait la perdre un jour.
Le reste de sa vie ne fut qu’une succession de corvées, de contraintes et d’étapes qui ne faisaient que la conduire un peu plus vers… un nouveau moment où elle devait s’occuper de sa famille. Ses parents ne faisaient que travailler tout le temps et elle n’en pouvait plus de tout gérer. L’amour qu’elle portait à sa famille était sans limite et sans faille mais elle avait besoin de penser à elle. Dès son plus jeune âge, elle avait fini par comprendre qu’elle ne pourrait se débrouiller que par elle-même. C’est pour cette raison qu’elle mit tout de son côté pour pouvoir se sortir de cette vie. Des services rendus contre paiements, de baby sitting et des nuits sans dormir pour que ses notes soient les plus hautes possibles afin que son dossier soit exemplaire et qu’elle finisse par obtenir une bourse pour partir et faire ses études. Il fallait à tout prix qu’elle parte pour avoir sa propre vie, pour qu’elle puisse avoir le droit de vivre comme toutes les filles normales. La route jusqu’à ce moment divin était longue toutefois. Elle faisait de son mieux pour mettre toutes les chances de son côté. Ses yeux s’étaient levés au ciel dans une expression de dépit quand elle avait vu son nom. Lenyn. Il fallait vraiment qu’elle se le coltine de partout celui là. Leurs familles étaient voisines depuis… quasiment toujours et sans même avoir besoin de se côtoyer outre mesure, elle savait que le garçon était le genre qu’elle adorerait détester. Il avait ce sourire mutin lorsqu’il jouait avec son père dans le jardin. Ce sourire qui lui faisait serrer son cœur parce que dans le fond, elle était simplement jalouse et furieuse qu’il ait droit à son enfance, qu’il ait droit à une famille même si elle était peu conventionnelle mais par-dessus tout qu’elle se le voit étaler devant les yeux à longueur de temps. Oui, elle était envieuse. Elle crevait d’envie d’avoir ce qu’il avait. Sa désinvolture par rapport à tout ce qu’il avait la rendait dingue et elle ne supportait pas l’idée qu’elle doive lui offrir encore plus en lui donnant des cours. Pourtant, elle le devait bien. Il avait des difficultés et elle n’allait pas le laisser se perdre dans les méandres des sciences. Ses efforts se faisaient de plus en plus importants au cours du temps parce qu’il faisait tout pour se rendre encore plus insupportable. «
Donc, la photosynthèse est l’entrée de l’énergie lumineuse dans la… Atkins, tu peux te concentrer s’teu plait ! » Il était en train de griffonner sur sa feuille des dessins en tout genre, elle le soupçonnait même de s’amuser à la caricaturer quand elle ne regardait pas. La patience n’était pas son fort, il fallait toujours que les choses soient faites dans l’instant avec elle mais avec lui ce n’était jamais possible. Il avait quinze ans, plein de revendications et lorsqu’elle lui demandait quelque chose, il se contentait de sourire avant de mâchonner son stylo. Il était insupportable, elle n’avait qu’une hâte, se barrer de ce lycée et de cette ville le plus vite possible pour laisser de côté toutes ces personnes qui lui rendaient la vie impossible.
Les rumeurs passaient trop vite dans cette ville, et il ne fallait même pas parler de leur lycée. Encore une chose qu’elle supportait mal dans cet endroit. Par moment, la curiosité de savoir ce que l’on pouvait dire sur sa famille hautement religieuse ou bien même sur elle et sa fâcheuse tendance à ne jamais sourire. Cette envie lui passait tout aussi rapidement que l’arrivée d’un nouveau commérage. «
Tu sais quoi ? Parait que Lenyn Atkins se tape la prof de chimie. » Elie était loin d’être friande de ces ragots mais elle ne put empêcher l’un de ses sourcils de se hausser de surprise. «
Staline ? N’importe quoi.. » Elle avait pris cette habitude de se moquer de lui en l’affublant de ce surnom, tout aussi stupide que son prénom de base. «
J’te jure, c’est ce que tout le monde dit en tout cas. » Elle haussa les épaules, elle ne voulait pas y croire. C’était n’importe quoi cette histoire, bien trop absurde pour qu’elle y prête une réelle attention. «
Il veut encore se faire remarquer, je plains juste madame Copeland. » Non… impossible. Une femme instruite et belle comme elle ne pouvait pas risquer autant de choses pour un gamin arrogant et insupportable. Et en même temps, elle savait aussi qu’il pouvait se montrer charmant. Il avait ce petit truc qui faisait que même si on le détestait, il était capable de provoquer une pointe au cœur parce qu’il avait ce côté attachant auquel personne ne pouvait résister. Ce côté qui avait fait qu’elle avait pu le supporter tout ce temps de tutorat, ce côté qui avait fait qu’elle rentrait un peu plus légère le soir chez elle. Alors oui, au fond, elle pouvait comprendre que l’on puisse craquer devant lui mais elle n’aimait pas se dire que tout ceci était la vérité parce qu’il lui avait fait une promesse et que finalement, il ne la tiendrait jamais.
Jamais elle n’aurait pensé que ce jour béni finirait par arriver par il était temps. Sa valise bouclée, l’attendait au pas de la porte de sa chambre, son vieux bureau vide la toisait comme s’il lui en voulait de le laisser au milieu de cette folie ambiante, ses bons vieux camarades les bouquins semblaient avoir cet air mélancolique et fier de la voir enfin voler de ses propres ailes. Elle partait. Wellington l’attendait et sa vie allait enfin pouvoir commencer. En tout cas, c’était ce qu’elle pensait. Il ne fallait pas croire que c’était avec gaieté de cœur qu’elle passait pour le tyran incapable de rire et de profiter de la vie. Elle avait dû endosser ce rôle parce que plus personne ne gérait rien chez elle mais elle voulait que les choses changent. Le fait était qu’en commençant des études de droit, elle n’avait pas forcément pensé au fait qu’elle allait potentiellement se retrouver submergée par les devoirs à rendre, les partiels et autres obligations de la vie seule. Cette charge de travail en aurait découragé plus d’un dès le premier mois mais il était hors de question qu’il soit dit qu’Elie laisse tomber quelque chose, n’y arrive pas. Et pourtant, ce n’était qu’une question d’ego parce que rien ne lui plaisait dans cette année d’étude. Rien à part lui. Connor Howlett, brillant, beau et pas le moins du monde superficiel ou hautain. A chaque fois qu’elle le voyait c’était à peine si elle pouvait détourner le regard de son visage. Elle sut dès le premier instant qu’elle serait dingue de lui. Le fait est que si son cœur rêvait de le rencontrer son cerveau n’arrivait pas à se mettre en marche. A chaque fois qu’ils se retrouvaient seuls dans une salle d’étude et qu’il lui demandait de lui passer un bouquin ou simplement qu’il lui disait bonjour, elle était incapable d’aligner deux mots. Elle avait passé sa vie à s’occuper de ses frères et sœurs, jamais elle ne s’était intéressée à un garçon et pour une fois elle se trouvait démunie devant une situation, incapable de contrôler les événements, incapable de contrôler ce qui arriva ce jour du 3 mai de l’an 2000. Elie avait décidé de quitter le droit, ne s’y trouvant pas à sa place, ne trouvant pas le moindre intérêt pour cette discipline. Cela faisait quelques mois qu’elle travaillait en temps que serveuse dans un café en même temps qu’elle prenait des cours par correspondance dans le management et la publicité. «
Excusez moi, un café à emporter s’il vous plait. » Et voilà qu’elle retrouvait tout. Cette gorge sèche, ces palpitations dans la poitrine, la sensation que plus rien n’allait aller dans son sens. «
Hé mais on se connait non ? On était en cours ensemble, Elie c’est ça ? » Et là, ce fut comme une explosion dans son cœur, une explosion qu’elle n’aurait jamais cru connaître parce qu’il était impensable pour elle de le retrouver ici et encore moins qu’il se souvienne d’elle et de son prénom. «
Oui c’est ça.. » Rien de plus, elle ne pouvait pas en dire plus étant donné qu’elle sentait que sa gorge cherchait à se resserrer pour ne plus jamais laisser échapper l’air. «
Moi c’est Connor.. » elle le regarda quelques secondes dans les yeux. Il était magnifique et ces yeux gris.. elle avait envie de se perdre dedans mais elle s’empressa tout de même d’enchaîner «
Howlett, oui, je sais. » Elle allait sûrement passer pour une harceleuse débile et le faire fuir mais non. Il se contenta de sourire, malicieusement et peut être même qu’elle vit une pointe de rouge monter à ses joues. En tout cas, Elie était sûre que c’était le cas pour elle. Les jours qui suivirent, elle le vit faire irruption à chaque fois dans le café. Ils passaient leur temps à se sourire de loin dans les premiers temps, puis il lui posa des questions jusqu’à lui demander de prendre un café avec lui quand elle aurait une pause, puis un verre, puis l’invita au restaurant. C’était comme si elle vivait un conte de fée, enfin un moment de vie pour elle, un moment de vie qu’elle voulait éternel tant la beauté en était époustouflante.
Et pendant un temps, ce fut le cas. Elle n’avait rien à lui reprocher, rien ne pouvait lui faire plus plaisir que passer une soirée avec lui mais elle allait finir par apprendre que le bonheur n’était qu’une notion éphémère. Pourtant, elle avait fini par y croire pour de bon, par mettre de côté les difficultés à vivre sa vie dans sa jeunesse. Ils s’étaient mariés lorsqu’ils avaient 25 ans et le jour de leur mariage, elle avait pensé que rien n’aurait pu lui faire plus plaisir que cet échange de consentement parce qu’elle savait qu’elle était en train de s’unir à l’homme de sa vie. Elle revoyait encore la mine ravie de sa famille, toute réunie pour fêter cet évènement, son père fier de la voir respecter ce saint sacrement et encore plus de savoir qu’elle n’avait jamais connu qu’un seul homme dans sa vie. C’était peut être la première fois qu’elle rentrait dans les bonnes grâces de son père et de la religion. En fait, elle ne voulait pas y penser ce jour là parce que rien ne pouvait gâcher ce bonheur. Aujourd’hui, elle avait 27ans, et elle avait été malade toute la semaine, au point de prendre rendez vous chez le médecin pour se faire ausculter et récupérer un certificat médical à fournir à son patron là où elle travaillait en temps qu’assistante publicitaire depuis deux ans maintenant. «
Ca va ? T’as l’air bizarre… » Lui avait demandé Connor quand il l’avait vu entrer dans leur maison. Elle releva les yeux vers lui, partagée entre l’envie de sourire et de fondre en larme devant la surprise. «
Je suis enceinte.. » Et elle finit par sourire parce qu’elle était heureuse. Ce bébé, elle le désirait. Elle avait toujours voulu avoir des enfants et ce rêve était enfin en train de devenir une réalité. «
Quoi ?! mais.. non.. enfin Elie, tu sais bien que le cabinet démarre à peine.. » Son sourire disparut aussi vite qu’il était arrivé sur son visage parce qu’elle voyait bien qu’il était perdu, qu’il doutait de ce qui était en train de se passer. Elle ne savait pas encore qu’ils étaient probablement en train de signer la fin de leur couple par ces simples mots. «
C’est pas grave ça Connor, y a le temps, on a de l’argent et puis… c’est plus important que le travail ce bébé.. notre bébé. » Le fruit de leur amour, celui qu’ils vivaient déjà depuis sept ans maintenant, cet amour qu’elle commençait à vouloir officialiser autrement que par de belles photos de mariages souriantes. «
Elie, je veux pas d’enfants, c’est hors de question. » Ce fut comme de recevoir un coup de poignard dans le cœur, peut être plusieurs en même temps mais elle ne laissa rien voir parce qu’avec les années, elle avait appris à ses côtés que les apparences étaient ce qu’il y avait de plus important. «
Ouais, bin de toutes façons, il est là alors tu vas faire avec. » Comme elle aurait voulu qu’il s’en contente, qu’il fasse avec comme elle lui avait ordonné de le faire mais la vérité en fut tout autrement. Il ne se passait pas un jour sans qu’ils ne se disputent, que ce soit à cause de l’enfant ou non. Leur couple était en train de partir en lambeau parce que la découverte de cette grossesse faisait ressortir le pire de sa personnalité. Ses reproches incessants n’avaient que faire que d’épuiser la future maman et alors qu’elle allait entamer son quatrième mois de gestation, elle sentit une douleur fulgurante dans son bas ventre. Elle était enceinte de quatre mois et seule dans son lit, elle était en train de perdre le bébé.
Cela faisait maintenant neuf ans qu’Elie avait perdu son bébé, la seule lueur d’espoir qu’elle avait eu depuis longtemps. Elle ne supportait presque plus vivre sous le même toit que son mari, se plongeant à corps perdu dans le travail. Se rendant compte qu’elle n’aurait pas d’enfant, elle avait fini par se concentrer sur sa carrière et par monter sa propre agence de publicité dans Wellington. C’était presque si elle n’y passait pas jour et nuit pour voir le moins possible Connor. Il n’était pas non plus en reste étant donné que dans le même temps il pouvait allègrement coucher avec toutes les filles qu’il voulait. Il ne fallait pas croire qu’ils ne s’aimaient plus. Il y avait toujours un réel amour entre ces deux là parce qu’elle était encore persuadée qu’il était l’homme de sa vie, peut être était-ce d’ailleurs une des raisons pour lesquelles elle ne l’avait toujours pas quitté malgré leurs disputes incessantes, leur éloignement et toutes ces tromperies dont elle était pourtant bien consciente. Elle savait qu’il y avait toujours ce quelque chose qui les avait fait tomber amoureux et peut être qu’un jour ils finiraient par retrouver cette étincelle. En attendant, ils formaient un couple dans les apparences mais dans l’intimité, ils n’en avaient pas le moindre aspect. A trente-six ans, la jolie blonde était en train de se rendre compte qu’elle était passée à côté de toute sa vie, passant son temps à s’occuper du bien être des autres avant de penser au sien. Peut être était-il temps de changer les choses, prendre le taureau par les cornes pour enfin accéder à cette vie qu’elle avait tant mérité. Si elle ne rentrait pas chez elle, elle n’était pas pour autant obligée de rester au bureau. Certains de ses employés lui avaient proposé de les accompagner dans un bar. Jamais elle ne se rendait dans ces endroits. Trop vieille, trop peur de perdre le contrôle, trop peu encline à s’amuser. Ce soir là, elle avait fini par accepter, comme si elle savait que sa vie devait prendre un tournant ce soir là, comme si elle savait que quelque chose l’attendait pour qu’elle puisse enfin aller de l’avant et prendre les décisions qui s’imposent. Ce pressentiment, jamais elle n’aurait pu imaginer d’où il venait, ni comment il se matérialiserait mais elle devait en avoir le cœur net parce qu’elle serait incapable de rentrer chez elle sans savoir si quelque chose l’attendait réellement. Peut être rentrerait-elle bredouille, sans le moindre signe, sans que quelque chose soit plus clair. Oui, Elie essayait de contrôler beaucoup de choses dans sa vie, mais il y avait une chose qu’elle ne pouvait pas contrôler, c’était la vie elle-même. Elle ne pouvait pas contrôler qu’il soit là ce soir, devant elle, son signe vivant, prêt à lui montrer que d’autres expériences étaient possibles, ce tyran d’un autre temps, Lenyn.