Partie histoire : Naître dans la famille Deighton c'est plutôt bien tomber, après viens la question de l'ordre d'arrivée, et si nos parents n'ont jamais fait de différence entre nous, cela ne voulait pas dire qu'il était aisé pour chacun de trouver sa place. Naître après les deux jumeaux Raphaël et Maelia, un fère avec des intérêts communs et une grande soeur également proche de Raphaël, c'est pas le rôle idéal, c'est même franchement compliqué.
Quand j'étais petite j'avais justifié ça par des milliards de théories plus abracadabrantes les unes que les autres, comme ce jour ou je suis tombée sur un livre de mythologie et me suis mise à gambader dans les vignes du domaine, persuadée d'être en fait une fille de Dionysos, ce qui expliquerait que je me sente à l'écart de mes frères. Autant dire que mes parents ont moyennement apprécié l'insinuation d'adultère, même avec un Dieu et ce quelque soit le réconfort que ça avait pu m'apporter. J'ai continué à gambader dans les vignes jusqu'à en faire ma passion, et puis, me rapprocher de mes parents et de leurs activités avait un côté sécurisant.
Rencontrer mon premier amour pendant les vendanges n'a probablement pas aidé non plus. Le décalage des dates avec les vendanges françaises aidant nous avions reçu un jeune français, Ulysse, un autre enfant de viticulteur au prénom hasardeux, de quelques années plus âgé que moi, et avec un caractère de chien. Le pire vraiment. Elevé dans une famille très traditionnelle, les superstitions quant à l'influence des femmes sur la qualité du vin avaient fait leur chemin ce qui a aboutit à un premier contact d'une extrême gêne dans l'atelier
Hey enchanté moi c'est Ulysse, t'as pas tes règles au moins ? Le vinaigre c'est pas mon truc je l'ai giflé, vraiment c'est parti tout seul
ok je prends ça pour un oui..
On s'était engueulés comme ça une bonne demie heure, à lui expliquer que ça n'avait rien à voir et qu'il n'avait qu'à retourner faire son vin tradi miso loin d'ici et que personne le retenait. Après j'étais partie dans les vignes, parce que je savais que mes parents n'approuveraient pas ce comportement de ma part, quelque soit ce qu'Ulysse avait fait. Alors que le soleil se couchait, j'ai entendu sa voix derrière moi,
eh, j'ai parlé avec les autres et ils m'ont dit que tu gérais l'organisation et les comptes rendus depuis 2 ans. c'est impressionant... il marqua une pause pour me laisser le temps de lui répondre, ce que je n'avais aucune intention de faire
je suis vraiment désolé, je t'ai jugée trop vite. je souriais, flattée malgré tout avant d'ajouter, sans prendre la peine de le regarder
"Tu sais même pas à quel point." "Montre moi alors ?"Nos regards se sont croisés, j'ai vu une étincelle de défi illuminer son regard et j'ai plus que jamais voulu gagner. Je lui ai dit de me rejoindre en haut de la petite colline qui surplombait le domaine après le dîner. Nous y avons passé la nuit, à boire du vin subtilement emprunté dans la cave familiale et à parler de nos rêves et nos passions. Les tensions ont rapidement laissé place à une grande tendresse. Je l'ai accompagné à son retour en France, afin d'observer leur vendanges aussi, même si personne n'était dupe des autres raisons qui m'avaient poussées à traverser le globe.
Si nous partagions la même passion, Ulyssee rêvait de grands palaces parisiens et d'y conseiller des clients et je n'ai pas pu me résoudre à le suivre, trop attachée à mes terres et à la production même du vin, je me suis dirigée vers l'oenologie, on s'est quittés le coeur lourd mais l'esprit léger en se promettant que quand mon vin serait à la carte de son palace on se retrouverait et se marierait. Je sais pas s'il s'en souviendra le mouvement venu, ni ce qu'il se passera si c'est le cas.
Une fois arrivée, j'étais très clairement concentrée sur mes études et déterminée, et si j'avais un groupe de potes assez sympa, je ne me suis vraiment liée à personne avant ma rencontre avec Eliza, la meilleure des amies et par la suite, la meilleure des colocs, ma moitié, mon double, la soeur dont j'avais rêvé. Elle m'a soutenue pendant ces années d'études, pendant mon attente des résultats. Et elle continue de le faire quand j'ai envie d'encastrer des collègues dans le mur parce qu'on me rappelle un peu trop souvent que je travaille dans un monde d'homme.